Préoccupation des employeurs, l’indemnisation du personnel en période d’activité partielle comme celle que nous vivons actuellement interroge.
Qu’avance l’employeur ? A qui ? Comment ? Combien ? Que perçoit-il de l’Etat ?
La combinaison de 3 textes de juin et juillet 2013 (Loi + Décret + Instruction) permet de mieux se situer sur ce que l’employeur doit au personnel concerné et sur ce que ce même employeur peut obtenir de l’Etat.
Avant de savoir dans quelles mesures ce dispositif est appelé à évoluer (cf. déclarations du Président Macron et du Gouvernement), appréhendons déjà, sa version actuelle.
Postulat de base – Le principe de l’activité partielle est de compenser la perte de revenu subie par les salariés du fait des heures non travaillées.
Les motifs de recours à l’activité partielle permettent de couvrir toutes les situations pour lesquelles les entreprises connaissent des baisses d'activité :
- conjoncture économique,
- difficultés d'approvisionnement en matières premières ou en énergie,
- sinistre,
- intempéries de caractère exceptionnel :
- transformation, restructuration ou modernisation de l'entreprise.
- autre circonstance de caractère exceptionnel.
L’activité partielle peut prendre deux formes différentes :
- une réduction du temps de travail en-dessous de la durée légale hebdomadaire ;
- une fermeture temporaire de tout ou partie de l'établissement, pendant laquelle les salariés sont en inactivité totale quel que soit le nombre de jours de fermeture, dans la limite cependant du contingent annuel d'heures indemnisables.
En cas de réduction collective de l'horaire de travail, les salariés peuvent être placés en position d'activité partielle individuellement et alternativement afin de pouvoir autoriser la mise en place d'un système de « roulement » par unité de production, atelier, services ...
Le dispositif est ouvert à tout salarié possédant un contrat de travail de droit français, y compris le salarié à temps partiel.
En sont exclus, ceux possédant un contrat de travail de droit français mais travaillant sur des sites localisés dans des pays tiers et les VRP possédant le statut « multicartes ».
Important : Lorsque les salariés sont placés en position d’activité partielle, le contrat de travail est suspendu mais non rompu. Ainsi, sur les heures ou périodes non travaillées, les salariés ne doivent ni être sur leur lieu de travail, ni à disposition de leur employeur, ni se conformer à ses directives.
I - Ce que l’employeur verse au personnel considéré en activité partielle
1 – Indemnisation- Le salarié placé en activité partielle bénéficie d’une indemnité horaire, versée par son employeur, correspondant à 70 % de sa rémunération brute servant d'assiette de l'indemnité de congés payés ramenée à un montant horaire sur la base de la durée légale du travail applicable dans l'entreprise.
Rappel : L’indemnité de congés payés est égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence ou si plus favorable, montant de la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler).
Pendant les actions de formation mentionnées à l'article L. 5122-2 mises en oeuvre pendant les heures chômées, cette indemnité horaire est portée à 100 % de la rémunération nette antérieure du salarié.
Possibilité pour l’employeur de verser plus :
Un accord d'entreprise ou une décision unilatérale d'une entreprise sur l'activité partielle peut préciser des modalités spécifiques d'indemnisation, étant entendu que l'indemnisation versée aux salariés pour les heures chômées ne pourra être inférieure aux taux (70 % du salaire horaire brut ou 100 % du salaire net horaire si le salarié suit des actions de formation).
Autrement dit, l’employeur peut fixer un montant d’indemnité horaire supérieur à celui prévu par la Loi. Pour ce faire, il est vivement conseillé de matérialiser ce dispositif de majoration par une note de service à afficher dans les locaux et à adresser au personnel concerné.
2 – Heures supplémentaires - Une entreprise n’a pas vocation dans la circonstance d’une activité partielle de son personnel de recourir à des heures supplémentaires pour ce même personnel.
Ceci étant, la question de la rémunération d’heures supplémentaires se pose en présence de salariés soumis à un horaire supérieur à la durée légale du travail en application d’un accord d’entreprise ou d’un contrat de travail (forfait en heures supplémentaires hebdomadaire ou mensuel : les 39h ou les 169h).
L’employeur est-il tenu de prendre en considération ces heures supplémentaires dans son indemnisation (cf. 1)?
La réponse est non.
Le contrat de travail est en effet, suspendu de sorte que l’employeur n’a pas l’obligation de verser le salaire convenu (autrement dit à hauteur de 39h par semaine par exemple).
3 – Forfait annuel en jours - Les salariés au forfait en heures ou en jours sur l'année sont exclus du champ d'application de l'activité partielle en cas de réduction d'horaire mais pas en cas de fermeture de tout ou partie d'établissement partielle.
Ainsi, dès qu'un établissement est fermé, pour une durée minimale d'une demi-journée, ces deux catégories de salariés sont éligibles au bénéfice de l'activité. Il faut entendre par fermeture d'établissement, l'arrêt total de l'activité :
- d'un établissement ou partie d'établissement,
- d'une unité de production,
- d'un service,
- d'un atelier,
- d'une équipe chargée de la réalisation d'un projet notamment en matière de prestations intellectuelles.
Lorsque la durée du travail du salarié est fixée par forfait en heures ou en jours sur l'année, est prise en compte, la durée légale correspondant aux jours de fermeture de l'établissement.
Illustration : La formule de calcul est la suivante pour une journée entière de fermeture :
Nombre de jours de fermeture x 7 heures.
Un salarié voit son établissement fermé deux journées par semaine pendant 4 semaines soit (2 j × 4 s) 8 journées de fermeture complète. Nombre d'heures à indemniser 8 j × 7 h = 56 heures.
Un salarié voit son établissement fermé pour deux journées et demie. Nombre de demi-journées de fermeture × 3 heures et 30 minutes. Nombre d'heures à indemniser (2 j × 7 h). + (3 h 30) = 17 heures et 30 minutes.
4 – Régime social - Les indemnités versées au personnel par l’employeur ne sont pas assujetties au versement forfaitaire sur les salaires, ni aux cotisations sociales. Même dans le cas d'une majoration de l'indemnité d'activité partielle dans le cadre d'un accord de branche, d'entreprise ou d'une décision unilatérale d'entreprise, ce régime social reste applicable à l'indemnité versée au salarié.
5 – Régime fiscal - L'indemnité d'activité partielle perçue par le salarié est intégrée dans le calcul de l'impôt sur le revenu.
6 – Impact de l’activité partielle - Pendant les heures chômées, du fait de la suspension du contrat de travail, les obligations contractuelles sont suspendues.
Deux conséquences sont à préciser :
a) - La possibilité pour le salarié d'occuper un autre emploi sous réserve que le contrat de travail du salarié en activité partielle ne comporte pas de clause licite d'exclusivité.
Sans mention expresse d'une telle clause dans son contrat de travail, il ne pourra être opposé au salarié un impératif d'exclusivité vis-à-vis de son employeur.
Le cumul d'emploi devra être réalisé dans le respect des principes de loyauté et de non-concurrence. Ceci implique que le salarié ne doit pas travailler pour le compte d'un autre employeur concurrent ou pour son propre compte de manière concurrente à son employeur.
Il est rappelé qu'aucun salarié ne peut accomplir des travaux rémunérés au-delà de la durée maximale du travail telle qu'elle ressort des dispositions légales de sa profession et aucun employeur ne peut recourir aux services d'une personne qui méconnaît les dispositions légales relatives à la durée du travail.
Le salarié doit informer son employeur de sa décision d'exercer une activité professionnelle chez un autre employeur pendant la suspension de son contrat de travail en précisant le nom de l'employeur et la durée prévisionnelle de travail.
Le salarié percevra de manière concomitante l'indemnité due au titre de l'activité partielle et la rémunération afférente aux emplois alternatifs.
A l'issue de la période d'activité partielle, le salarié décide soit de reprendre le travail chez son employeur principal (il rompt alors le contrat de travail qu'il a contracté chez un autre employeur), soit de démissionner de son emploi initial.
b) - Afin de neutraliser les effets de l'activité partielle sur l'acquisition de certains droits des salariés, l'article R. 5122-11, précise que toutes les heures chômées, qu'elles ouvrent droit ou non au versement de l'allocation d'activité partielle, sont intégralement prises en compte pour :
- le calcul des droits à congés payés,
- le calcul de la répartition de la participation et de l'intéressement lorsque :
cette répartition est proportionnelle à la durée de présence du salarié,
cette répartition est proportionnelle au salaire : les salaires à prendre en compte sont ceux qu'auraient perçus le salarié s'il n'avait pas été placé en activité partielle.
7 – Interruption du bénéficie de l’activité partielle - Certaines situations peuvent mettre un terme à la situation d'activité partielle d'un salarié. Il s'agit de :
- la notification de son licenciement,
- la notification au salarié de la rupture négociée pour motif économique ou à défaut la date de la rupture négociée,
- l'homologation par la DIRECCTE de la rupture conventionnelle,
- la date de départ en retraite,
- la date d'expiration du contrat de travail, c'est-à-dire la fin du préavis en cas de mise à la retraite.
II - Ce que l’employeur perçoit comme compensation, de l’Etat en période d’activité partielle
1 – Champ d’application - Pour chaque heure chômée ouvrant droit à indemnisation, l'employeur percevra une allocation d'activité partielle dont le montant est fixé comme suit :
- 7,74 € par heure chômée pour les entreprises de 1 à 250 salariés,
- 7,23 € par heure chômée pour celles de plus de 250 salariés.
Seules les heures chômées dans la limite de la durée légale ouvrent droit au versement de l'allocation d'activité partielle.
Important : Les heures supplémentaires chômées n’ouvrent pas droit à allocation. Elles sont considérées comme chômées mais n'ouvrent droit ni au versement par l'État à l'employeur de l'allocation d'activité partielle, ni au versement par l'employeur d'une indemnité au salarié.
2 – Plafond - Les heures chômées ouvrent droit au versement de l'allocation d'activité́ dans la limite de 1 000 heures par an et par salarié. Cette limite de 1 000 heures ne peut être dépassée que dans les cas exceptionnels résultant de la situation particulière de l'entreprise sur décision conjointe des ministres chargés de l'emploi et du budget.
3 - Difficultés financières – L’employeur qui se trouve confronté à difficultés financières dont il peut justifier la réalité et la gravité, peut solliciter auprès du préfet ou de la Direccte, le paiement direct de l'allocation d'activité partielle aux salariés.
4 – Comment faire une demande d’activité partielle ? - Toutes les demandes doivent être déposées en amont du placement effectif des salariés en activité partielle, sur le portail dédié :
Considérant qu’il n’est pas toujours possible d’anticiper les demandes d’activité partielle avant le placement des salariés en activité partielle. Dans ce cas, les employeurs sont invités à déposer leur demande d’activité partielle dans un délai raisonnable après le début de la période demandée.
5 - Quel est le délai d’instruction de la demande d’activité partielle ? - La réglementation applicable prévoit que l’autorité administrative dispose de 15 jours maximum pour instruire la demande. A l’issue de ce délai et en l’absence de réponse de l’administration, la demande est réputée acceptée. Il a cependant été donné instruction de traiter prioritairement les demandes liées au Covid-19 afin de réduire fortement le délai effectif d’instruction."
Flash - Droit du travail
"L’indemnisation du salarié en activité partielle"
Par Me Laurent DUCHARLET
22 boulevard Vincent Auriol 31170 Tournefeuille
Comentários